Isidore LAKS
Isidore est né le 20 février 1934, dans le 12e arrondissement de Paris[1], de nationalité française. Ses parents, Fayga Trzcinka[2], née à Varsovie le 5 avril 1904, et Isaak Laks, né à Lipsk le 21 octobre 1897, ont tous les deux émigré en France dans les années 1920. C’est à Paris qu’ils se sont connus et, ne disposant pas de papiers valides, se sont mariés uniquement à la synagogue. Ce qui n’empêche pas Isaak Laks de reconnaître ses enfants.
Cadet d’une fratrie de trois garçons et une fille, Isidore a une sœur aînée, Paulette, née en 1929, et deux petits frères : Henri, né en 1936, et Maurice, en 1937.
En Pologne, Isaak Laks était cordonnier, mais en France, il gagne sa vie en tant que tricoteur. Fayga est couturière. Jusqu’à la naissance d’Henri, ils vivent rue Bisson dans le 20e arrondissement de Paris, près du parc de Belleville, puis ils déménagent une première fois rue des Trois Bornes, dans le 11e, dans le quartier de la Folie-Méricourt.
En 1940, la famille s’installe dans un appartement de la Régie Immobilière de la Ville de Paris, dans la toute récente rue Louis-Ganne, dans le 20e. Isaak fait une demande d’incorporation dans l’armée française.[3] Déchu de sa nationalité polonaise, il demande au préfet de Police l’échange de sa carte d’identité au titre de Polonais contre une carte d’identité portant la mention « nationalité indéterminée », document indispensable à son incorporation dans la Légion étrangère. Cette nouvelle carte d’identité lui a été délivrée pour trois ans, mais il semble qu’il n’ait jamais été incorporé. L’armistice est signé le 22 juin.
Nous ne disposons actuellement d’aucune information pour l’année 1941.
En 1942, Maurice, et sans doute Henri, sont envoyés en nourrice à Chavagnes-en-Paillers (Vendée) et scolarisés dès le mois de mars[4]. Paulette, les rejoint en juin. Isidore reste seul avec ses parents à Paris. Isidore a 8 ans lors de la rafle du Vel d’hiv du 16 juillet 1942. La police française arrête son père, l’interne à Drancy[5] et le déporte à Auschwitz, le 24 juillet 1942 par le convoi numéro 10[6]. Isaac y décède d’une néphrite, le 27 septembre 1942[7]. Isidore et sa mère échappent à l’arrestation. Fayga se retrouve seule avec son fils. A-t-elle décidé de placer Isidore en nourrice à Roye, dans la Somme, ou bien les services sociaux le lui ont-ils proposé ? En tout cas, il s’y trouve vraisemblablement dès le mois d’août, tandis que Fayga part rejoindre ses autres enfants à Chavagnes-en-Paillers. Elle y demeure jusqu’en octobre 1942, date à laquelle la municipalité l’oblige à quitter la ville, estimant que sa présence met en danger les nombreux enfants cachés dans la commune. Elle revient alors à Paris et se cache chez un ami. Isidore est toujours à Roye ; son comportement agité embarrasse sa nourrice et inquiète sa mère. Elle décide donc d’envoyer Paulette à ses côtés dans la Somme. Isidore retrouve sa sœur, qui a 13 ans, dès l’automne 1942.
Le 5 décembre, Fayga est arrêtée et internée à Drancy[8]. Elle écrit plusieurs lettres à sa sœur Sarah, qui réside avec toute sa famille à Paris[9]. Elle lui demande de l’aide et surtout de prendre en charge ses enfants.
1943 : Isidore vit avec sa sœur à Roye. C’est un enfant turbulent, souvent puni et privé de nourriture. Paulette lui donne en cachette du chocolat, qu’elle récupère grâce à sa carte J3 (des bons alimentaires ou tickets de rationnement) et dont elle se prive pour lui. Ensemble, ils vont dans les bois cueillir du muguet et le vendre pour ensuite s’acheter des gaufres.
Fayga est déportée à Auschwitz, le 9 février 1943, par le convoi numéro 46[10]. Isidore est désormais orphelin ; il l’ignore. Cet événement marque sans doute la fin des versements de pensions aux nourrices. Les enfants sont tous ramenés à Paris par les services sociaux.
Henri est enregistré le 8 septembre à l’UGIF, rue Lamarck[11]. Il est souffrant ; une famille le recueille et le cache durant toute la guerre. Paulette est prise en charge par l’OSE[12], qui la transfère immédiatement chez une nourrice à Brou, en Eure et Loir, tout comme Maurice, qui apparaît scolarisé à Brou à partir du 18 octobre[13]. Isidore est enregistré par l’UGIF comme « entrant » au centre de la rue Lamarck, le 8 octobre[14]. Il est désormais seul à Paris et son nom figure sur les listes des « enfants bloqués », ces enfants qui sont enregistrés par le Service de renseignements de la SS (SD) et officiellement internés avec leurs parents à Drancy, mais qui ont été confiés à l’UGIF pour les placer dans des homes d’enfants ou chez des particuliers, juifs ou non. Leur lieu d’hébergement est donc connu des autorités de Drancy. Nous n’avons pas encore pu établir pourquoi Isidore figure sur ces listes. Peut-être est-ce en tant qu’enfant isolé ?
1944 : Le 23 février, une grande rafle est organisée à Brou où se trouvent Paulette et Maurice, qui y échappent. Isidore, lui, est toujours rue Lamarck. Mais le centre déménage après sa destruction par les bombardements des Alliés des 20 et 21 avril. L’UGIF réquisitionne en mai l’immeuble du 28, avenue Secrétan, où est installée l’école Lucien-de-Hirsch, pour y placer tous les enfants « bloqués-isolés ». Maurice reste à Brou jusqu’à la fin de la guerre. Mais la tante Sarah vient chercher Paulette, qui a peut-être été rapatriée à Secrétan, pour l’héberger chez elle ; Isidore, ce garçon turbulent, reste avenue Secrétan. Paulette vient le voir tous les dimanches et l’emmène se promener dans Paris.
Le 24 juillet 1944, sur ordre d’Aloïs Brunner, les enfants confiés à l’UGIF sont raflés par la gendarmerie française. Isidore est arrêté avec les cent neuf enfants et les maîtres de l’école Lucien-de-Hirsch. Il est interné à Drancy[15] d’où il est déporté le 31 juillet 1944 par le convoi 77[16], qui arrive le 3 ou le 5 août[17] 1944 à Auschwitz. Les enfants ont presque tous été assassinés à l’arrivée.
Références
[1] Certificat de naissance
[2] Carte d’identité
[3] Courrier de la Préfecture de Police au ministère de l’Intérieur avril 1940
[4] OSE-Liste partielle des enfants juifs cachés
[5] Archives nationales, site de Pierrefitte-MIC/F/5708-Fichier individuel de Drancy
[6] Serge Klarsfeld-Liste du convoi 10
[7] SIR Bad Arolsen-matricule 33055
[8] Archives nationales, site de Pierrefitte-MIC/F/5641-Fichier individuel de Drancy
[9] Archives familiales – Lettres de Fayga Trzcinka du 1er au 7 février 1943.
[10] Serge Klarsfeld-Liste du convoi 46
[11] Mémorial de la Shoah-Fonds UGIF-MK490(43)695
[12] OSE : Œuvre de secours aux enfants, créée en 1912 à Saint-Pétersbourg et destinée au sauvetage des enfants juifs, cette association tentera tant bien que mal de protéger et sauver les enfants pendant la seconde guerre mondiale, et prendra en charge plus de 2000 orphelins après guerre.
[13] Lettre de Yves Bernard, enfant de Brou
[14] Mémorial de la Shoah-Fonds UGIF-MK490(43)727
[15] Archives Nationales-Pierrefitte-Fichier des enfants internés à Drancy-MIC/F/9/5745
[16] Serge Klarsfeld-Liste du convoi 77
[17] Legifrance. JORF n°0253 du 30 octobre 2011, page 18353, texte n°19. Arrêté du 30 août 2011 portant la mention « Mort en déportation », etc. : « décédé le 5 août à Auschwitz ».
bonjour Reste il des membres de cette famille vivants ? Paulette, Henri , Maurice ? on t ils pu fonder une famille?
Bonjour, je serai heureuse de vous donner des nouvelles et de connaitre les liens que vous avez avec ma famille. Je vous adresse un mail personnel en ce sens.
Bonjour
Nous sommes les trois rescapés de cette famille Laks durement frappée par le nazisme : mon père, ma mère et mon frère Isidore.
Paulette (92 ans) vit une vieillesse paisible avec sa fille Francine près d’elle
Henri (84 ans) près de son son fils Patrick vieillit doucement
et moi, Maurice, (83 ans) je suis bien vivant auprès de mon épouse Annette et mes trois enfants : Pierre-François, Catherine adhérente à cette association, et Nicolas.
Et vous qui vous intéressez à notre famille, qui êtes-vous ? Je suis curieux de connaître votre intérêt pour nous.
A vous lire, bien cordialement
Maurice laks
Bonjour,
Je fais des recherches sur mon histoire familiale , ma mère Logna Jablonka et son frère Henri ont été cachés dans la Somme à Nesle (certainement par le Comité Amelot ) . Dans les archives du comité une nourrice était en charge d’enfants cachés Mme Bonnay 63 rue St Médard Roye.
Avez vous des informations concernant MME Bonnay ou tous autres informations sur les enfants cachés dans la somme ou sur l’action du Comité Amelot dans la Somme.
Merci
Cordialement.
Michel Brami
bonjour
je viens de voir à l’instant votre message.
Non je n’ai pas de liens avec votre famille. La mienne n’a pas connu la déportation. Si se n’est la souffrance occasionnée par la guerre. Mon grand père paternel a été prisonnier de guerre au Stalags II A de Neubrandenburg pendant 3 ans. En 2002 je suis partie en Allemagne sur ses traces. J ‘ai écris son histoire dans la Revue du Tarn. Mon papa a souffert comme vous du manque de son père mais lui l a retrouvé à la fin de la guerre.
Si je me suis intéressé à la shoah s’est lié à mon d’éducation . Mon papa à toujours dit » qu’être raciste c’est penser qu’il y a des gens qui comptent moins que les autres et que on garde en mémoire les paroles d’Antoine de Saint Exupéry « Si tu diffères de moi mon frère loin de me léser tu m enrichis . » Je me suis intéressée à votre histoire suite à certaines circonstances : Ma soeur professeur d’histoire organise bénévolement le concours de la résistance et de la déportation, Par ailleurs j’ai participé à un voyage à Auschwitz qui m’a bouleversé. Je me suis intéressé à la vie d’Isidore à la suite du documentaire sur youtube de Ruth Zylberman sur « Enfance Brisé » 209 Rue Saint Maur ainsi que son livre retraçant la vie de familles juives et leurs enfants certains cachés.
Sur le site du Memorial de la shoah je fais des recherches pour savoir si les enfants sont partis seuls où avec leurs parents et je tombe sur la photo d’Isidore je vois qu’il part le 31 juillet 1944 à quelques jours de la libération de Paris donc la vie pour lui. Je continue ma recherche et j’ai vu son papa Isaac, sa maman Fayga déportés aussi. Je découvre le témoignage émouvant de votre fille . Ce petit Isidore me fait penser à mon petit fils Sacha, Il me hante. J’ ai voulu savoir si le reste de la famille a pu échapper . Voila pourquoi j ai écris mon message.
je suis très heureuse que Paulette, Henri et vous même et pu construire chacun une famille, malgré une enfance chaotique. Je comprends que cela n’a pas été facile pour vous 3. Je serai très heureuse d’échanger avec vous.. Prenez soin de vous. Cordialement Martine Bordes-Bouisset
Bonjour Monsieur LAKS,
Ma famille est de ROYE dans la Somme.
Ma maman née en 1930 travaillait après les années 1945 sur les marchés de Roye, avec une jeune fille d’à peu près son âge.
Tout les vendredi elle aidait une crémière qui venait avec sa camionnette vendre des produits laitiers ect..
Je pense que c’était votre soeur.
Je m’intéresse beaucoup à la Shoah. Je travaille en ce moment sur la généalogie d’un ami qui a perdu plus de 13 membres de sa famille dans les camps.
Cet ami est décédé maintenant, mais je lui ai promis que je continuerai à parler des personnes déportés, afin de ne jamais les oublier.
Bientôt le dernier des survivants des camps fermera les yeux, et c’est à nous de prendre le relais afin de continuer à leur rendre hommage.
Cordialement
Nicole SCOTTE MONVILLE
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Bonjour,
Je fais des recherches sur mon histoire familiale , ma mère Logna Jablonka et son frère Henri ont été cachés dans la Somme à Nesle (certainement par le Comité Amelot ) . Dans les archives du comité une nourrice était en charge d’enfants cachés Mme Bonnay 63 rue St Médard Roye.
Avez vous des informations concernant MME Bonnay ou tous autres informations sur les enfants cachés dans la somme ou sur l’action du Comité Amelot dans la Somme.
Merci
Cordialement.
Michel Brami
Bonjour,
Je ne vais pas souvent sur le site, c’est pourquoi je lis seulement maintenant votre message. Lors de mes recherches sur Roye, j’ai contacté la mairie et j’ai été mise en relations avec la documentaliste. Malheureusement elle n’a pas pu m’apporter d’informations plus précises sur le parcours d’Isidor et Paulette dans cette commune, les archives semblant avoir été détruite. à l’époque je n’ai pas été plus loin. Je ne connais donc pas l’identité de leur nourrice. Vous parlez de madame Bonnay, comment l’avez vous identifiée, êtes vous entré en contact avec elle ou ses descendants ? Je serai heureuse de communiquer avec vous sur ces éléments.
Cordialement
Catherine Laks